ILS SONT TROP FORTS POUR NOUS. ils sont nuancés. ils trouvent toujours le juste milieu. (ils ne sont pas patauds comme nous, pauvres âmes.) ils condamneront tout débordement d’un côté ou de l’autre. dans les deux camps. le camp fasciste et le camp antifasciste. car leur parole est pure. elle est sybylline. crystalline. truc en ine. leur parole existe en dehors de tout. elle s’élève au-dessus de tout. la question de où la parole se fait, quand la parole se fait, comment se fait-elle, ne leur importe guère. il suffit que la parole dise la vérité toute seule. ou plutôt « leur sentiment », car « la vérité » déjà ça les attaquerait trop d'essayer, c’est encore trop d’autre qui rentre chez eux. leur sentiment doit être seul à parler. indistinctement du contexte. des secousses. du terrain. la parole chez eux n’est nullement physique, elle est une sorte de chose fluette qui coule. souple, sportive, leur parole est en pleine forme pour éviter tous les obstacles. (contrairement à nous qui nous prenons le premier obstacle venu.) leur parole est gazeuse. une petite musique. une atmosphère. il faut mettre tous les mots clés. pour dire qu’on est concernés par tout. l’antisémitisme des nazis et l’antisémitisme des anti-nazis. Il faut le répeter, insister là-dessus, et dire qu’on est très concernés. sans rien dire de plus. leur parole se dérobe au réel. C’est une parole dans une éprouvette. à l’abris de tout. peu lui importe d’aboyer avec les loups. elle ne verra pas que la parole, la pensée, n’est pas qu’instrumentalisée, mais est parfois déjà-loup selon qui la reprend. que la pensée est une action que des gens actionnent. que même certains ont dit, sûrement par rage de ces penseurs au-dessus du lot, qu’il n’y avait au fond du fond pas de mots. mais des forces. qu’il y a des moulins actionnés et qu’il faut parfois choisir aussi dans quel moulin donnner de l’eau. que ça ça fait partie du devoir de vérité. Eux considèrent que la vérité c’est venir après tout le vivant et poser son avis dessus. ils ne diraient d'ailleurs pas vérité mais plutôt leur sentiment et montrer le fait d’être bien concerné par tout. peu leur importe qu’un énoncé se fait dans un contexte et répond dors-et-déjà à une question à laquelle on décide ou pas de répondre. ils répondent à un QCM quand ils parlent. ils répondent à toutes les questions de la police. toutes les questions que bien sûr ils choisissent de se poser. peu leur importe que ces questions soient posées par les puissants. et ces questions et ces réponses de pures questions et réponses d’éprouvettes dans du pur chloroforme. que ces questions n’aient aucun intérêt. que ça ne réponde à aucun besoin. ils ont le temps. et loin d’eux l’idée de penser que la pensée a un rapport avec le où, le quand, le comment, et le si on a le temps ou pas. loin d’eux de penser que déjà la pensée est un peu ce temps, ce déploiement dans le temps. et ce peu de temps. que cette durée, qu’on a ici petite, est la pensée elle-même, et qu'il y n'y a peut-être que des durées qui s'affrontent, des espaces-temps, des forces. et qu’il n’y a pas vraiment de pensée consistante qui aurait un temps infini pour disserter. et que c’est lié à l’intérêt d’une telle pensée. et que le peu de temps de la pensée et que donc l’intérêt d’une pensée sera aussi un rapport à la vérité et au réel. puisqu’on ne vit pas hors tout. ils répondent à des questions que personne ne pose. ils en font des longs paragraphes (imbitables). peu leur importe que ce soit des purs réponses abstraites à des questions qui n’intéressent personne (des questions elle-même abstraites). de pures abstractions dans leur pureté d’abstraction. ils parlent comme ils répondraient à un questionnaire. sur la réalité ou sur leur sentiment. comme si cette réalité n’était que transcriptible après l’avoir vue. qu’elle n’était pas dans les mots, qu’elle n’agissait pas sur les mots et que les mots n’agissaient pas sur elle. mais étant en dehors d’elle les mots auraient comme tout le temps, ensuite, de la reconstituer. chose par chose. sans en oublier une seule. ils répondront à toutes les questions. ils vous referont tout par le menu. ils vous reconstitueront tout. toute la réalité. ils joueront à Dieu. Ils vous feront l’histoire depuis l’antiquité. ils feront tout sauf vous dire quelque chose d’intéressant. ils sont trop forts. ils se donnent du mal. ils sont travailleurs. et leurs abstractions servent le moulin des fascistes. et leur abstraction sont de l’eau au moulin de nazis. et leur abstractions sont des fausses abstractions puisqu’elles agissent bien concrètement. en nourrisant le moulin des fascistes. on ne sait pas bien s’ils en sont bien conscients. s’ils sont plus attachés à la bourgeoisie ou à la pureté de leurs idées. ou si ce n’est pas un peu la même chose. puis en sous catégorie, s’ils sont intéressés par leur bourgeoisie, alors s’ils sont bien conscients que ça amène au fascisme et si ça leur en touche une sans faire bouger l’autre ou s’ils sont complétement cons.
ils ne sourient pas. ils vous feront des sourires de collègues de travail. ils savent quand arrêter un sourire et quand le commencer. ils ne font pas de ces sourires qui débordent un peu. qui débordent sur le moment d’après. ces sourires baveux. ils ne laissent aucune trace de bave. pour eux il n’y a pas de sauce entre les moments. entre les mots d’une phrase et dans l’affection qu’on a pour une pensée ou un.e penseurse. dans le travail qu’on se met à faire avec lui ou elle. ils analysent les penseurs avec le stylo rouge à la bouche. ils disséquent sa phrase et soulignent tous les mots. jamais ils n’adorent quelque chose car il faut toujours se méfier. ils gardent tout à sa place. toute relation bien gardée. collègues de travail pour la révolution, on verra plus tard pour la passion. Après la révolution faite selon les termes de quelques barbus. Ils veulent tout faire tout seul. Ils n’appartiennent à rien et en sont fiers. pas d’alliance. on verra plus tard une fois que tout le monde aura deserté la guerre. Aura eu des paroles pures. ils sont pacifistes et pour le désarmement. du moment qu’ils peuvent continuer à ne rien faire contre la guerre. qu’ils peuvent continuer à bombarder. ils bandent sur les révolutionnaires locaux. les moyens émeutiers. pour mieux cacher qu’ils ne veulent pas arrêter les guerres. ils mettent tout dans des cases. Ils veulent s’organiser mais ne disent jamais organiser quoi. s’organiser devient un mot sans aucun sens. aucune place pour les doutes, aucune place pour les rêves maladroitement dessinés, qui se passent maintenant plus sur le net que dans les assemblées. ils ne sont pas drôles. ils ne prennent pas la pensée par le milieu. ils la prennent comme une somme de mots les uns après les autres. qu’ils peuvent souligner pour celui-là et « valider » pour celui-ci. ils font des « likes » et jamais de « j’adore ». ils sont restés sur facebook. ils ne comprennent pas que la passion est une action et non seulement une lecture, une appréciation. ils ne comprennent pas que la passion est nécessaire puisqu’elle est s’engager dans une conversation, d’aimer ces façons de réflechir et ce qui est dessiné, plus même que le coeur de la pensée, car ils n'ont pas compris qu'au coeur de la pensée il n'y a pas grand chose, et qu'il ne sert à rien d'attendre de se réferer à leurs grimoires avant de nous décocher un sourire et commencer à penser.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire